« Forme(s) de la contestation écologique : désobéissance civile, incivile ou violence légitime ? »
Résumé
Pour qualifier l’action de certains militants écologistes ou apparentés lors de violents affrontements avec les forces de l’ordre dans la commune de Sainte-Soline, en raison de la contestation d’un projet controversé de méga-bassine, le ministre de l’Intérieur français Gérald Darmanin a employé le terme « écoterrorisme ». Si le terme n’est pas un néologisme et a été d’abord mobilisé par les services américains (FBI) , son emploi a suscité des réactions critiques diverses pour des raisons politiques et idéologiques. Cela étant, l’irruption et l’inscription durable des enjeux écologiques dans l’espace public pose en effet une question politique majeure : quelles seront les formes prises par la contestation au nom du bien commun qu’est la protection de la planète et la lutte contre le changement climatique ? Nous voudrions ici interroger et comparer trois modalités et paradigmes de la contestation écologique, à partir des pensées exprimées dans des ouvrages théoriques à finalité pratique, pour mieux comprendre et étudier les évolutions des formes de contestation au regard de cet enjeu contemporain spécifique. Premièrement, la désobéissance civile, qui semble être le moyen naturel d’action des militants écologistes à travers le monde, comme le défend par exemple l’ouvrage co-écrit par l’influent universitaire franco-suisse Dominique Bourg, Désobéir pour la terre . Deuxièmement, la notion plus récente de « désobéissance incivile », au cœur notamment de la réflexion de Candice Delmas dans Le Devoir de résister. Apologie de la désobéissance incivile qui regroupe à la fois des actes motivés par « des principes qui ne cherchent pas à être civils, mais aussi des cas controversés de désobéissance civile ». Troisièmement, le recours à des méthodes violentes, au nom de l’inefficacité d’un pacifisme intégral, violence qui porterait néanmoins sur les infrastructures et les biens et non sur les personnes, comme dans l’œuvre du géographe et militant suédois Andreas Malm Comment saboter un pipeline . Ces références s’inscrivent dans des contextes culturels distincts et leur compréhension nécessite de tenir compte et de comparer la réception dont ils font l’objet. Notre hypothèse principale est que le motif d’action écologique, s’il possède des affinités avec les motifs de lutte traditionnels (défense proclamée de l’intérêt général, souci de justice et d’égalité) possède toutefois une singularité et amène à repenser les formes classiques de la contestation politique.
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JUILLARD_Jean-Baptiste_Forme(s)_contestation_écologique_CTJC_v5_n1_2024 (version auteur).pdf (725)
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